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L’hiver du Belomorkanal
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Province oubliée du nord de la Russie, voisine de la Finlande, la Carélie a le même climat sub-arctique, les mêmes nuits blanches, les mêmes paysages illimités de forêts et de lacs. Mais pas le même niveau de vie. Sous Staline, on y a construit le célèbre canal de la Baltique à la mer Blanche, popularisé par une immense propagande. Il devait ouvrir la voie à l’industrialisation. Près de vingt mille bagnards du Goulag y ont laissé leur vie. Quelques usines ont poussé le long du canal – cellulose, pâte à papier, aluminium, scieries - mais depuis la fin de l’Union soviétique, beaucoup ont fermé leurs portes et le canal est entré en sommeil. Tandis que les jeunes quittent la région, les vieux s’accrochent au souvenir de l’épopée soviétique.

Ecrivain et journaliste, Anne Brunswic a déjà beaucoup voyagé en Russie. Ses livres sur ce thème : « Sibérie, un voyage au pays des femmes » (2006) et "Les eaux glacées du Belomorkanal", (2009) éd Actes Sud.
Photos : copyright A. Brunswic

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Medvejegorsk, port sur l’Onega.

LUNDI La colline aux ours

Medvejégorsk (autrement dit La Colline aux Ours), 18 000 hab. C’est là, tout au nord du lac Onéga, que l’administration du Goulag installe en 1931 les bureaux du canal. Des prisonniers affluent de partout : le chantier devient un fleuron du premier plan quinquennal. La petite station sur la ligne de chemin de fer de Mourmansk entre en effervescence et une nouvelle ville pousse. 75 ans plus tard, elle reste profondément marquée par son passé stalinien. Rencontre avec Loudmila, 70 ans, qui a longtemps travaillé pour le canal et visite du musée du canal en compagnie d’Ilya, un jeune conservateur passionné par l’histoire de la région.

La Colline aux Ours

Medvejegorsk, escalier de l'hôtel du BBK. {JPEG}

MARDI Belomorsk

Belomorsk, chorale des femmes. {JPEG}
Partant du lac Oniéga, le canal se jette 227 kilomètres au nord dans la mer Blanche. Mais attention, le canal reste un « objet stratégique » étroitement surveillé. Puisqu’il est interdit de le photographier et de le visiter. Dans le port de Bielomorsk, toute l’activité est retombée depuis les années 1990. Taux record d’alcoolisme et de mortalité. Les employées de la morgue brossent un tableau sombre de la situation sociale, notamment pour les retraités. Sur la grand-place, un meeting rassemble ceux qui protestent contre la vie chère et la dégradation des logements.

Belomorsk, mer Blanche

Belomorsk, les deux employées de la morgue. {JPEG}

MERCREDI Le Goulag de l’archipel

Kem, 14 000 habitants, est un petit port sur la mer Blanche qui vit surtout du commerce du bois. Le Goulag a marqué son histoire dès 1923, quand s’est ouvert le premier camp de travail soviétique, aux îles Solovkis. L’embarcadère est encore là. Mais ce sont des touristes et des pélerins aujourd’hui qui embarquent vers le monastère. Guénadi Sonnikov, 62 ans, professeur d’histoire, fait visiter le port. Il raconte aussi l’histoire de sa famille, carélienne de souche, tiraillée entre la Finlande et la Russie.

Kem, le Goulag de l’archipel

JEUDI Nuits blanches

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Belomorsk. Une vieille dame mal logée fait visiter son appartement en ruines, battu par les vents. Chacun résiste comme il peut à la déprime. Beaucoup se retrouvent dans des chorales où l’ambiance est plutôt joyeuse. Et l’on attend l’été et ses nuits blanches pour aller se baigner, pêcher en mer Blanche ou cueillir baies et champignons.

Belomorsk, nuits blanches

VENDREDI Pâques russes

Segueja, meeting contre la vie chère. {JPEG}
Soumpossad, au bord de la mer Blanche, est un gros village (1200 hab), autrefois fameux pour ses églises. Anne Brunswic y arrive la veille de Pâques. Beaucoup ont découvert ou redécouvert la foi au cours des dernières années. « Il faut bien croire à quelque chose » disent-ils. En attendant la construction d’une nouvelle église (les anciennes ont été détruites sous Staline), on célèbre les offices dans une maison privée au bord de la rivière gelée. Avec ferveur. Zinaïda, 76 ans, prépare le gâteau de Pâques, le fameux koulitch. Dans sa jeunesse, un camp du Goulag occupait l’autre côté de la rivière. Elle a aimé un des prisonniers, l’infirmier. Puis est devenue institutrice, directrice d’école. Restée communiste de cœur, elle se bat pour la survie du village.

Pâques sur la mer Blanche


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